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Par Francis Muyshondt.

La fintech belge Easyvest, spécialisée dans l’investissement indiciel, lancera son fonds de pension multi-employeurs, l’Easyvest Pension Fund, le 12 octobre 2024. L’objectif est d’offrir une alternative dans ce que l’on appelle le deuxième pilier avec ce service de fonds de pension, de renforcer la concurrence avec l’assurance collective traditionnelle et de simplifier les plans de pension collectifs. Nous nous sommes entretenus avec Matthieu Remy, PDG et fondateur d’Easyvest, qui nous a expliqué les raisons de ce lancement et ses aspects pratiques.

Point de vue pratique

Par le nom Easyvest Pension Fund on pense immédiatement à une sicav ou Sicav. Mais ce n’est pas le cas, selon Matthieu Remy. « Il s’agit d’une société distincte sous la marque Easyvest qui peut offrir différents portefeuilles à tout employé ou employeur. Il s’agit d’une société réglementée par la FSMA, qui dispose notamment de son propre responsable de la conformité, de son propre gestionnaire de risques, de son propre auditeur interne et de son propre auditeur d’entreprise. » Il a ajouté que le fonds de pension, avec lequel on travaillera, est une structure bien connue en Belgique qui, il est vrai, ne représente que 20 % du marché des plans de pension complémentaires. Les 80 % restants du marché sont des polices d’assurance de groupe à rendement garanti. Étant donné qu’il fonctionnera sous la structure d’un fonds de pension, les portefeuilles proposés par Easyvest Pension Fund seront également composés d’actions. « Il est tout à fait illogique que ces derniers ne le fassent pas, même s’ils investissent à long terme en vue de leur retraite », souligne M. Remy.

Les portefeuilles gérés dans le cadre du fonds de pension Easyvest seront constitués des deux mêmes ETF que le groupe utilise déjà aujourd’hui dans sa stratégie d’investissement traditionnelle. D’une part, il existe un ETF actions qui suit les 9 000 sociétés cotées dans le monde. D’autre part, le gestionnaire utilise un ETF contenant uniquement des obligations d’État européennes de la zone euro, qui est moins risqué et produit des rendements inférieurs. « En fonction de l’âge, en tant que salarié, vous avez un peu plus de l’un ou un peu plus de l’autre. Pour donner un exemple concret : À 25 ans, vous avez 90 % d’actions et 10 % d’obligations. Elle diminue ensuite progressivement avec l’âge. Au moment où vous prendrez votre retraite, vous serez plus proche de 50 % d’actions et de 50 % d’obligations », explique le PDG.

L’individualisation

Le fonds de pension fait l’objet d’une gestion dite discrétionnaire et c’est Easyvest qui décide de l’allocation du portefeuille en fonction des objectifs du client. « Le client est essentiellement l’employeur, mais nous prenons également en compte l’employé. Mon rêve est que nous puissions aller vers l’individualisation des régimes de retraite professionnelle. Dès le départ, un compte par employé et une gestion discrétionnaire individualisée. Tout cela est organisé au niveau de l’entreprise et du fonds de pension. »

Remy souligne qu’Easyvest dispose de la technologie nécessaire et que les réglementations existent, mais aujourd’hui, la plupart des fonds de pension et des compagnies d’assurance travaillent simplement avec le concept d’assurance de groupe : tout le monde épargne dans le même pot et a le même portefeuille et la même allocation. Et quand on part, on reçoit une part de la cagnotte. « Aujourd’hui, les gens changent d’emploi et d’employeur en moyenne trois ou quatre fois au cours de leur vie active. L’aspect collectif est donc moins important à mon avis, ce qui signifie que nous devrions davantage individualiser le système de pension. Aujourd’hui, cependant, c’est toujours le groupe qui décide, c’est-à-dire l’employeur. » Rémy veut faire les choses différemment. « Nous recommanderons à l’employeur une charte de gestion qui fonctionnera comme suit. Nous examinons chaque employé individuellement et, en fonction de son âge, nous adaptons la stratégie. Plus précisément, nous créons pour chaque employé un portefeuille dont le profil de risque et la répartition évolueront au fil du temps en fonction de l’âge de l’employé. »

Calcul des coûts

Le coût total du fonds de pension Easyvest est de 1,5 % des actifs sous gestion et il n’y a pas de frais d’entrée et de sortie. « C’est un peu plus cher que les frais de gestion normaux d’Easyvest, qui fluctuent entre 0,5 et 1 %. Mais il y a beaucoup plus d’administration impliquée que ce que les gens voient beaucoup moins. Nous devons rendre compte beaucoup plus souvent à différents organismes et la surveillance prudentielle est plus importante. Nous gérons également des primes comparativement plus modestes, de 1 000 à 2 000 euros par an. Ces coûts sont donc plus élevés que la normale chez nous, mais moins élevés que dans les assurances de groupe traditionnelles, où le coût d’entrée est facilement de 5 %. Les fonds sous-jacents de la Branche 21 dans lesquels les investissements sont effectués par la suite facturent en outre entre 1,5 et 1,8 % par an, ainsi que des frais de sortie et d’autres frais. En moyenne, nous sommes donc beaucoup moins chers que le marché grâce au partage des coûts de structure entre les différents employeurs et à la numérisation de l’ensemble. »

Enfin l’innovation

Pendant des années, il y a eu peu d’innovation sur le marché des régimes de retraite complémentaire des salariés et 80 % d’entre eux sont des régimes de groupe. Ces contrats sont principalement basés sur des produits de la branche 21, qui garantissent le capital, prennent peu de risques et génèrent des rendements limités. Avec le lancement d’Easyvest Pension Fund, la fintech veut changer cela. Mais pourquoi a-t-il fallu attendre si longtemps pour que quelque chose de nouveau arrive sur le marché ? Matthieu Remy cite trois raisons à cela. « En effet, le marché de la retraite des salariés est géré par un petit nombre d’acteurs qui occupent une position très dominante, comme AG et AXA. Dans un marché aussi concentré et peu concurrentiel, et cela vaut pour tous les marchés, il n’y a guère de raison d’innover. Deuxièmement, le secteur de l’assurance, et en particulier l’assurance vie et l’épargne retraite, est à la traîne en termes de numérisation, ce qui est une extension de la première raison. Troisièmement, l’environnement des taux d’intérêt de ces dernières années joue également un rôle, car les taux d’intérêt bas exercent une pression sur les compagnies d’assurance. Il en résulte des bénéfices plus importants, ce qui laisse moins d’argent pour investir dans l’innovation. »

Pour Easyvest, il s’agira d’un mur plus difficile à franchir. « Les clients potentiels, tels que les services RH des entreprises, devront être bien informés car l’épargne collective via un fonds de pension est moins connue mais, à notre avis, une solution plus efficace », explique M. Remy. Easyvest se concentrera principalement sur les PME mal desservies. Ce faisant, le PDG a à l’esprit un théorème de Clayton Christensen : servir ceux qui ne le sont pas avec une solution plus simple. « Nous pensons que de nombreux acteurs déjà desservis par des solutions souvent très compliquées seront plus satisfaits d’une solution plus simple. » Il ajoute que les deux grands acteurs du marché des pensions sont principalement présents dans le domaine des grandes entreprises (1 000 entreprises représentent 50 % de l’ensemble des salariés en Belgique) et sont moins actifs sur le marché des petites entreprises. « Quelle que soit leur taille, les employeurs peuvent désormais adhérer au fonds de pension Easyvest pour offrir à leurs employés et à leurs cadres des plans de pension à long terme très performants, entièrement basés sur des fonds indiciels ETF », souligne-t-il également.

Comment entrer sur le marché ?

Selon M. Remy, ce n’est pas toujours l’employeur qui demande une meilleure solution, mais l’employé lui-même qui souhaite un plan de pension différent. « De plus en plus de travailleurs se rendent compte qu’investir dans un produit de la branche 21 avec un rendement de 2 % ne permet pas de suivre l’inflation. Il est d’ailleurs aberrant qu’une personne âgée de 25 ou 30 ans et ayant encore des dizaines d’années à épargner, investisse aujourd’hui principalement dans des obligations d’État par le biais de son assurance de groupe. » En outre, il a également souligné qu’une grande partie de la population qui ne dispose que du salaire de son travail comme revenu et qui n’a pas accès au capital et à ses revenus peut désormais l’obtenir par le biais du fonds de pension Easyvest. « Pour ces employés, notre solution, qui consiste à investir une partie de leur salaire dans des ETF d’actions et à épargner par l’intermédiaire de leur employeur, est le seul moyen d’accéder à un revenu du capital. »

Pour conquérir de nouveaux clients, Easyvest utilisera également des canaux différents de ceux des acteurs traditionnels. « Nous allons utiliser nos outils de marketing numérique en créant toutes sortes de contenus tels que des vidéos, des blogs, des médias sociaux, des webinaires, etc. En fin de compte, l’objectif est de construire une communauté que nous voulons informer et nourrir chaque jour. C’est nécessaire parce que tout ce qui entoure la retraite est compliqué et se compose de nombreux détails. » En outre, le groupe prévoit de créer un ChatGPT spécialisé dans la retraite. « Notre rêve est que lorsqu’un département RH a une question très spécifique sur la retraite, il puisse obtenir une réponse très personnalisée et concrète par le biais d’Easyvest GPT. Nous essayons d’être aussi perturbateurs que possible et de donner un coup de pied aux tibias des valeurs établies, un peu comme le fait French Alan dans le domaine de l’assurance hospitalisation, où il licencie des acteurs bien connus tels que DKV ou P&V. »

Ambition et plus grand défi

Le directeur général Matthieu Remy est très ambitieux et ne le cache pas en fixant des objectifs clairs. « L’ambition est de convaincre 10 000 entreprises belges d’adhérer à Easyvest Pension Fund en 10 ans au bénéfice de 100 000 travailleurs belges, avec un total d’un milliard d’euros d’actifs sous gestion. Aujourd’hui, nous gérons 200 millions d’euros pour 3 000 clients, qui sont à la fois des particuliers et des entreprises, y compris de nombreux dirigeants d’entreprise ou des administrateurs de sociétés plus petites. La croissance s’accélère nettement puisque le compteur s’élevait à 120 millions d’euros au début de l’année. « Nous avons pu mettre cela sur le compte de la confiance qui nous est accordée et du fait que nous commençons tranquillement à être connus d’un public plus large. Pour notre nouveau chapitre sur les pensions, nous voulons tirer parti de cette situation. »

Le plus grand défi pour Easyvest est de pouvoir s’établir comme un acteur fiable en tant que petit acteur. « Nous existons depuis huit ans et la confiance augmente progressivement. Cependant, surtout en ce qui concerne les pensions à long terme, nous devons être en mesure de démontrer encore davantage qu’Easyvest sera toujours là dans 30 ans. Easyvest fait donc partie d’une chaîne de conservation sécurisée, ce qui signifie que le capital de nos clients sera toujours disponible, même dans le cas improbable d’une faillite. Les investissements seront finalement déposés dans les « coffres » de la Banque nationale de Belgique et d’Euroclear, qui pourront toujours récupérer leurs réserves de liquidités et de titres.

Et nous devrons être en mesure de transmettre ce message aux clients potentiels. Et les acteurs existants ont bien sûr un avantage dans ce domaine », conclut-il.

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